Un modèle de rénovation énergétique
des grands ensembles en copropriété :
POURQUOI ?
Pourquoi s’intéresser aux grands ensembles ?
Parce qu’ils sont là.
(Pourquoi grimper des voies, des montagnes ?
Il y a 100 ans, Mallory, explorateur de l’Everest résumait la question en un lapidaire mais essentiel,
« parce qu’elles sont là ».)
Mais aussi parce qu’ils ont leurs raisons.
Audrey Courbebaisse, Le sens caché des grands ensembles, Toulouse : PUM, coll. Architectures.
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Cette position est aussi celle de Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal, architectes, prix Pritzker 2021, lorsqu’ils entreprennent (avec Frédéric Druot et Christophe Hutin) en 2017, la transformation des 530 logements des bâtiments G, H, I, du quartier du Grand Parc de Bordeaux, trois tours qui étaient vouées pourtant à la démolition. Cette position n’est pas celle de Xavier Huillard, P-dg du groupe Vinci (entretien à Batiactu : il existe des biens dans un état tel qu’il n’y a aucun intérêt à les rénover.)
Toutes ces positions sont légitimes même si la question de la démolition des grands ensembles reste posée : Marion Kindermans, Faut-il démolir les grands ensembles, Les Echos, 21 juin 2018.
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La conciliation est toutefois recherchée : Audrey Courbebaisse et Natacha Issot, Les grands ensembles ou comment concilier réhabilitation et patrimonialisation ? In Situ, Revue des patrimoines.
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Pourquoi une absence de vision globale ?
La vision du problème est brouillée du fait d’un empilement législatif.
Heureusement la création récente de France Rénov’ guichet unique, espace conseil dédié à la rénovation, devrait permettre aux particuliers l’accès à une information cohérente et concentrée.
Pourquoi certains dispositifs mériteront à l’avenir une plus grande attention ?
Des dispositifs tels que le tiers financement (Loi ALUR 2014) et les contrats de performance énergétique (CPE) bénéficient désormais de l’attention de l’État, ainsi qu’il en est confirmé par une communication gouvernementale publiée le en février 2024 incitant les collectivités à se saisir du marché global tiers-financé, via le recours aux contrats de performance énergétique (CPE).
SOURCE ACTU ENVIRONNEMENT – SOURCE ALTEREA
Pour massifier la rénovation énergétique, l’État encourage les collectivités à se saisir du marché global tiers-financé, via le recours aux contrats de performance énergétique (CPE). Par le biais d’un CPE, fournisseurs et entreprises spécialisées s’engagent auprès des collectivités locales sur des objectifs d’économies d’énergie.
Le modèle mis en ligne constitue, depuis deux années déjà, une application anticipée de cette communication.
Les acteurs de la rénovation énergétique ont donc à leur disposition des outils leur permettant d’engager des opérations de rénovation énergétique à grande échelle, adaptées à la spécificité des grands ensembles.
Pourquoi certaines identifications de problèmes ont été laissés de coté ?
Dans le contexte d’urgence climatique, d’inégalités marquées par la précarité énergétique, Olivier Sichel, directeur de la Banque des Territoires, a été missionné par le gouvernement pour identifier des leviers d’action en vue de massifier la rénovation énergétique des logements privés, en particulier les millions de passoires thermiques.
Nous avons relevé dans le rapport Sichel une absence totale de propositions permettant d’apporter une réponse aux besoins de rénovations énergétiques des grands ensembles des années 1950/1970.
On veut pour preuve de cette absence de propositions un audit de la Cour des comptes publié le 30 septembre 2021 sur le dispositif MaPrimeRénov’.
Cet audit ne fait aucune allusion à un quelconque dispositif spécifique aux grands ensembles.
Pourtant, il s’agit ici d’une physionomie représentant un nombre considérable de bâtiments.
Sans doute le rapporteur a été arrêté par divers obstacles – l’objectif est bien entendu de les surmonter.
Ce sera au moyen de propositions qui seront développées à la rubrique COMMENT ?
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Pourquoi les principaux professionnels intéressés ne sont pas plus présents sur ce sujet ?
Pour la Fédération Française du Bâtiment (FFB), son vice-président Franck Perraud explique que les entreprises sont prêtes mais ont des difficultés à trouver le modèle économique adéquat.
Audition de Franck Perraud à l’Assemblée nationale.
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Pourquoi le droit est en mesure d’apporter une contribution importante au sujet ?
Les dispositifs législatifs s’avèrent riches d’innovations juridiques à développer. Ils doivent permettre en conséquence de démontrer combien le droit peut, grâce au travail créatif du juriste, accompagner les évolutions de la société civile dans une action majeure pour son avenir, celle de la sobriété énergétique.
Olivier Ortega et Pauline Maurus, avocats, Les contrats de performance énergétique, Ed.LexisNexis, quatrième de couverture.
La voie du droit est désormais tracée. Le présent travail s’efforce d’accompagner le processus de rénovation des grands ensembles à partir de propositions juridiques innovantes.
Pourquoi les responsables politiques n’ont jamais pris la rénovation au sérieux ?
Ce secteur est négligé, alors que c’est à priori là qu’il serait le plus simple de réduire les émissions.
La conséquence de cette négligence fait que beaucoup de logements sont concernés mais peu de travaux sont entrepris.
Olivier Sidler, Négawatt, in. Rénovation énergétique : une décennie de perdue
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Isabelle Rey-Lefebvre, Rénovation énergétique, Le Monde
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L’effort financier de l’État n’est pourtant pas en reste du fait du soutien en investissement et en primes d’environ 14 milliards d’euros sur le quinquennat 2022/2027 alloués au plan de rénovation énergétique des bâtiments, complétés par plus de 5 milliards d’euros de certificats d’économie d’énergie directement utilisés pour financer des travaux de rénovation énergétique.
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l’État conduit d’ailleurs avec l’Anru une action déterminante : quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) pour les rendre « plus résilients », et vise à déployer des solutions pour aider des quartiers à faire face aux enjeux climatiques et énergétiques. A ce titre, le ministre du logement estime que l’urgence environnementale croise souvent l’urgence sociale face aux enjeux climatiques et énergétiques.
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Si la rénovation énergétique est si lente à mettre en place et à massifier, c’est aussi parce qu’elle manque à la fois d’une vraie prise en charge publique et d’un soutien de la part des immobiliers…Tout le monde s’accorde sur l’importance de la rénovation énergétique, mais elle n’avance pas, nous sommes face à une véritable cacophonie : Andreas Rüdinger, chercheur associé à l’Institut du Développement Durable et des Relations Internationales (IDDRI), Polytechnique insights, revue de l’institut polytechnique de Paris, Quel avenir pour la rénovation thermique des bâtiments, part.1, Pourquoi la rénovation thermique ne décolle pas.
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Malgré l’effort du gouvernement aucune mesure concrète de grande envergure ne pourra être actuellement retenue sur les 19 propositions issues de la restitution des travaux du Conseil national de la refondation (CNR) : Toutes ne pourront être mises en œuvre sur le champ – qui peut croire que l’état des finances publiques puisse nous le permettre ? Mais chacune sera étudiée, décortiquée, prise en considération. Toutes seront versées au CNR du Président de la République, conformément à sa demande et à l’esprit même du Conseil national de la refondation.
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Certaines propositions ont été émises dans le rapport final du groupe de travail Repenser la place du logement dans la transition énergétique et écologique animé par Marjolaine Meynier-Millefer, députée de l’Isère, et Christine Leconte, présidente du conseil national de l’Ordre des architectes : proposition équilibrer les territoires, 01 Un grand plan national d’aménagement du territoire « France 2050 » (p.7) . Ces propositions revisitent l’action à l’échelle des territoires.
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Elles rejoignent nos propres observations développées à la rubrique OÙ, Où se situent les grands ensembles sur le territoire national ?, ainsi qu’à la rubrique COMMENT, Comment s’appuyer sur des procédures administratives existantes pour rénover massivement ?
Pourquoi faut-il envisager de recourir au Pacte vert européen ?
On examinera à la rubrique COMMENT, le rôle de l’institution européenne, en particulier dans le processus de financement des actions de rénovation de bâtiments.
Pourquoi la période actuelle devient charnière ?
La période est charnière pour trouver les moyens de permettre la prise en mains par les acteurs professionnels d’une production significative de rénovations énergétique, financièrement et juridiquement sécurisées.
Le défi de la rénovation énergétique des grands ensembles ne devrait pas s’avérer insurmontable puisqu’il s’agit de réparer à partir du modèle proposé sur une durée de vingt années (scénarios énergétiques auxquels la France devra faire face d’ici 2035), ce qui a été produit sur la même durée par l’État aménageur (1950/1970).
La mobilisation ne doit plus attendre. Il s’agit d’une course de vitesse pour apporter des contributions en matière de transition écologique des grands ensembles énergivores.
Cette prise en mains est inéluctable parce que après le neuf viendra rapidement le tour de la rénovation en matière d’économies d’énergie et de limitation des émissions de carbone des bâtiments sur l’ensemble de leur cycle de vie.
Pourquoi faut-il envisager des rénovations complètes et performantes ?
Les conclusions de l’assemblée EnerJ-meeting de 2020 rejoignent la solution prônée par des organisations comme le Cler ou négaWatt pour l’action climatique dans le sens de la rénovation complète et performante : travaux réalisés en une seule fois, traitant autant de l’isolation thermique de l’ensemble du bâtiment, des systèmes de chauffage et de ventilation, que de l’étanchéité à l’air, voire des services (fourniture d’énergie et d’eau).
Au plan technique, la réalisation de grands projets en est souvent confiée à un seul opérateur, à une seule entreprise pour une meilleure coordination des corps de métier. La mobilisation pour le secteur de la rénovation est d’autant plus importante que le marché de l’emploi va souffrir dans le BTP, secteur intimement lié aux promoteurs du secteur du neuf : d’après la Fédération des promoteurs immobiliers FPI, le manque d’offres, la hausse des prix, la baisse du nombre des permis de construire…
c’est tout simplement la chronique d’une crise annoncée.
Jessica Ibelaïdene, Les promoteurs perçoivent dans leur situation actuelle la chronique d’une crise annoncée :
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La crise annoncée est désormais présente. C’est encore dans le secteur de la production du neuf que la sonnette d’alarme vient d’être tirée. Les acteurs de la construction et de l’immobilier implorent un électrochoc indispensable avec des mesures de soutien aux collectivités, pour relancer l’offre de logements et, au-delà d’un financement public lié à l’urgence des solutions bancaires : Le Parisien.
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Pourquoi l’impact de la rénovation est plus limité que l’impact dans le neuf ?
La rénovation d’un bâtiment présente un impact beaucoup plus limité que la construction d’un bâtiment neuf de même surface.
La rénovation est ainsi nettement moins consommatrice de matériaux que la construction neuve.
Les bâtiments neufs (1 % du bâti) sont 5 fois plus sobres en énergie que les anciens, mais cela ne représente que 0,2 % d’économies. Ainsi, un effort supplémentaire sur l’efficacité énergétique des bâtiments neufs est comparable à éteindre l’autoradio pour économiser du carburant !
Les efforts bas-carbone dans le secteur neuf n’ont donc qu’un résultat à la marge sur les émissions de GES.
Olivier Fléchon, Chef de service Bâtiment à CEA Tech, The Conversation, 28 mars 2018, Un effet à la marge.
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En comparaison la rénovation consomme au niveau national environ 1000 fois moins de matière (en masse) que le neuf en 2015.
A l’horizon 2050, malgré d’importants efforts sur la rénovation et de fortes restrictions sur le neuf, ce ratio reste de l’ordre de 12.
The Shift Project, Habiter dans une société bas carbone, Plan de transformation de l’économie française PTEF, éd. Odile Jacob, p.52 :
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Pourquoi la guerre actuelle en Ukraine risque de faire prendre du retard ?
La situation de guerre au sein de l’Europe risque de faire passer à un moindre rang les préoccupations environnementales par rapport à d’autres qui paraissent plus urgentes (pouvoir d’achat, santé, fournitures d’énergie…)
Même si les grandes économies cherchent déjà à relancer la production de charbon, de pétrole et de gaz, la transition énergétique devrait rester la priorité.
Perrine Mouterde et Audrey Garric, La guerre en Ukraine risque-t-elle de freiner la lutte contre le dérèglement climatique, Le Monde :
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Il en est de même pour les mesures d’aides qui accompagnent ces législations :
Certificats d’économie d’énergie (CEE), MaPrimeRénov’, MaPrimeRénov’ copropriété, TVA à 5,5% pour certains travaux, éco-prêt à taux zéro…
La loi ALUR codifiée aux articles L. 381-1 et suivants CCH institue le tiers-financement. Il s’agit d’un dispositif qui consiste à faire financer les travaux par un tiers qui accompagne l’opération, depuis la conception du projet par le propriétaire, jusqu’à la réalisation des travaux.
Cet accompagnement intègre le financement des travaux sur une durée d’amortissement longue.
Le tiers financement constitue un dispositif qui a pour limite le montage financier complet d’une opération.
Dans cette situation, le tiers financeur n’influe pas sur le projet.
Ce type de contrat a été institué par la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement en 2009.
Travaux du sociologue Renaud Epstein sur le recensement des ZUP à l’origine des grands ensembles représentant à l’époque l’instrument d’urbanisme, œuvre de l’État aménageur.
On est bien arrivés, Un tour de table des grands ensembles, éd. Le nouvel Attila.
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L’union européenne intervient désormais en grande ampleur avec la mise en oeuvre d’une vague de rénovations pour l’Europe (plaquette de l’UE) :
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La conclusion de l’assemblée EnerJ-meeting Paris 2020 était prémonitoire. Il s’agissait de la constatation de la fin des années heureuses pour les promoteurs et les aménageurs.
Avec la nouvelle exigence zéro artificialisation nette des sols, ils devront réduire de moitié leur consommation foncière d’ici à 2030 et se réinventer, sans doute dans la rénovation.
L’Unis, qui rassemble les métiers de la gestion immobilière, et l’Unfsa, principal syndicat des architectes, ont joint leurs forces pour proposer à toute la filière de travailler dans l’intelligence collective en matière de rénovation des copropriétés avec l’idée que les autres acteurs professionnels de la filière se joignent aux discussions. La démarche, vise à développer un langage commun, via un référentiel adapté à la copropriété, en transversal, pour mieux se comprendre.
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Devant l’urgence de la situation, il faudra toujours choisir la rénovation plutôt que la destruction et la reconstruction. Il faut désormais s’intéresser aux bâtiments existants, qu’on regarde depuis peu..
Pour l’architecte Patrick Rubin c’est évident : tous les bâtiments que l’on démolissait auparavant, on va les garder : il faut réparer les bâtiments dont le tribut carbone est payé.
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